Des Sœurs des Sacrés-Cœurs en Algérie, trente ans de présence au Grand Séminaire d’Oran (France)

Quelques décennies avant de s’implanter plus durablement sur le continent africain dans la seconde moitié du XXème siècle, les Sœurs de Mormaison ont assuré une présence discrète, mais indispensable au Séminaire d’Oran, en Algérie durant un peu plus de trente années (1926-1957).

Des Filles du Bon Père Monnereau pour la tenue matérielle du Séminaire

C’est à Monseigneur Durand (1878-1945) Évêque d’Oran, qui avait entendu parler des Filles du Bon Père Monnereau, que l’on doit l’envoi de quelques sœurs pour l’Algérie. Pour convaincre la Supérieure de l’époque, il viendra durant trois années de suite à Mormaison lui demander de lui donner des sœurs pour le Grand Séminaire. Plusieurs raisons furent mises sur la table, d’abord, l’extrême besoin pour le Grand Séminaire d’avoir des personnes d’ordre et de piété, et puis l’intérêt de la Congrégation d’avoir une maison en Oranie, ou elle pourrait envoyer se reposer et se guérir les jeunes Sœurs fatiguées de la poitrine.

Prudente, Mère Joseph de Nazareth (1869-1955) avec son conseil, décide tout de même la fondation du 216ème établissement de la Congrégation. Précisant bien que « cette fondation à Oran est un essai sans engagement définitif d’installation ». Le dimanche des rameaux, 28 mars 1926, les trois premières sœurs destinées pour cette nouvelle fondation partent, il s’agit de Sr Anne de Montfort (Esther Baudry) Supérieure de la fondation, de Sœur Saint Sébastien (Césarine Migné) et de Sœur Marie Saint Roch (Clémentine Orieux).

Le Séminaire d’Oran avant l’arrivée des sœurs est dans une pénible situation. Il accueille les grands et les petits séminaristes, qui sont peu nombreux et dont certaines vocations sont chancelantes. Pour ce qui est de la cuisine et de la tenue matérielle générale du séminaire, elle laisse à désirer. À leur arrivée, les trois sœurs doivent s’atteler à la tâche et ne pas ménager leur peine. Rapidement, seront reconnus leur dévouement, la qualité de leur travail pour les soins matériels d’alimentation, de la lingerie et un peu plus tard pour la tenue de l’économat du Séminaire. L’évêque d’Oran viendra même en personne à Mormaison, afin de remercier la Supérieure pour le travail réalisé au service des séminaristes et demander du renfort.

Récit d’un voyage, pour le jubilé d’argent des Sœurs des Sacrés-Cœurs : 25 ans de présence

Après le décès de Mgr Durand, en 1945, la Supérieure songe à rappeler les Sœurs du Séminaire. Mais c’est sans compter sur l’insistance du nouvel Évêque, Monseigneur Lacaste (1897-1994) qui ne voulait pas perdre l’aide précieuse des sœurs Mormaison pour le Séminaire. Il dira même « J’attache une grande importance, au fait d’avoir à Oran des Religieuses de Mormaison. Les petits et les grands séminaristes ont besoin de voir des âmes qui prient et qui vivent dans la joie au service de Notre Seigneur ».

En 1951, cela fait vingt-cinq ans que les sœurs assurent la tenue matérielle du Séminaire, à cette occasion, une grande fête est organisée. La Supérieure Générale, Mère Ange du Sacré-Cœur (1878-1967) accompagnée de Sœur Louise du Sauveur traversent toutes deux la Méditerranée pour aller visiter les Sœurs d’Oran. Après avoir quitté la Vendée le 28 avril, elles arrivent le lendemain à Port-Vendres où « le grand paquebot l’El-Mansour nous attend pour nous transporter vers l’Afrique, 1000 km de traversée nous attendent ». Le lundi 30 avril, bouchons sur le pont du navire, « car déjà au loin, se dessine la crête des monts africains, nous approchons d’Oran, nous apercevons les monts, les villas semées sur les pentes, et surtout le sanctuaire de la Vierge de Santa-Crux, puis la ville bien assise sur le plateau, avec ses toits plats et ses palmiers ». Sur le port, une foule frémissante attend le paquebot, et quelques minutes après avoir mis pied à terre, les sœurs sont au Séminaire.

Le 2 mai, grande liesse au Séminaire, la joie fuse de partout, on fête les 25 ans de présence des Sœurs des Sacrés-Cœurs au Séminaire d’Oran. D’abord le matin avec la messe célébrée par Mgr Lacaste, puis le soir à la salle des fêtes ou tout le Séminaire est là, « nous sommes accueillies par une salve d’applaudissements, puis les chants continuent […] Mgr Lacaste tire les conclusions. Il fait ressortir en termes choisis les qualités de chacune de nos sœurs, celles des deux jubilaires surtout, leur travail silencieux, leur effacement en particulier, leur exemple permanent, la puissance du réseau de prières dont elles enveloppent professeurs et élèves ».

En 1957, après plus de trente ans de présence, la Congrégation décide le retrait des Religieuses du Séminaire d’Oran. Durant ces quelques années, les Sœurs de Mormaison auront contribué à faire grandir par « un humble et obscur labeur […] la vocation de nombreux prêtres, qui resteront longtemps imprégnés de l’esprit de ces religieuses, qu’ils ont vu prier et mettre dans leur prière, dans l’intimité de Notre Seigneur, toute la joie de leur vie ».

 

Thomas Aubin, archiviste de la congrégation